L’ombre oblongue

Une ombre oblongue se détachait du soleil. Certains jours, elle était à peine perceptible, formant un halo léger, comme la couronne de l’astre luxuriant.

Mais les jours où elle gagnait la bataille contre les rayons, sa démesure autour de l’étoile brûlante irradiait telle un trou noir, aspirant tout sur son passage.

On ne parlait pas là de l’ombre bienfaisante dont ont besoin les fraises des bois pour rougir et se gorger de sucre ou de celle formée par les persiennes en été sur le parquet des maisons anciennes : on pouvait y glisser un pied, les après-midi paresseux quand on avait dormi comme un chat dans des draps de lin ou fait l’amour sans bruit, pour ne pas troubler la quiétude des lieux.

Il était question ici d’une noirceur tranchante et froide, et dont la rapidité à croître atteignait la vitesse du son. Une ombre portée, large comme les galaxies, poussiéreuse des désespoirs assemblés comme une tumeur en son sein. Une gangue de glaise gluante.

Elle se déployait après avoir dévoré la lumière et englouti la beauté. Puis, sa pesanteur d’enclume s’affadissait, et elle reprenait en un souffle sa place et sa taille, acceptables. Mais elle ne disparaissait jamais.

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